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Un soupir fila sur ses lèvres doucement, alors que tout lui rappelait autour de lui qu’il devrait bouger. Assis au coin d’un mur et avachi à sa façon, il n’en avait pas envie pourtant, même si son corps entier lui réclamait de se lever, sa peau commençant à prendre la même température que celle des cadavres, enfin c’est ce qu’il en déduisait en ne sentant pratiquement plus le bout de ses doigts dans lesquels était posé son cellulaire de la même couleur que ses vêtements. Ajouter à cela la chair de poule qui serait surement visible s’il portait des manches courtes. Pourtant ce pays se voulait plus chaud que la Russie, faut pas chercher il n’y a rien à comprendre.

Encore quelques minutes, assis peinard à écouter de la bonne musique. Le problème c’est que pour continuer il allait devoir se brancher sur l’internet et que son engin ne semblait plus vouloir capter, les barres ayant décidé de disparaitre de sur l’écran. Zakhar fronça doucement les sourcils, attendant quelques instants pour voir s’il reviendrait mais il n’en fit rien. Il bougea doucement les doigts puis se leva, décidant de quitter la cachette des Morlocks pour remonter à la surface, rangeant d’un seul mouvement l’engin qui lui causait de plus en plus d’ennuis de réseau.

La nuit devait bientôt tomber sur la ville, le ciel se couchant doucement à l’horizon, semblant aussi lâche que le Russe en ce moment même. C’était un bon point pour lui par contre, n’ayant pas l’envie pressante et inexpliquée de se mêler à une foule criarde se promenant en parfait touriste en plein jour, pointant pour une raison qui l’échappe encore chaque petite chose ‘extraordinaire’ qu’ils croisaient. C’est pourquoi il n’allait pas non plus s’approcher des rues touristiques ou de Central Park et ce même si la journée semblait en apparence terminée.

Sortir n’avait pas été compliqué, simplement attendre que ses yeux s’habituent aux nombreuses lumières de la ville le fut un peu plus. N’y portant pas trop attention il marcha un peu en attendant que cela passe. On se croirait presque à Manhattan dans ce coin reculé, avec une population pratiquement plus espagnole qu’américaine, se décelant aisément par le simple fait de marcher et d’entendre les dialectes parlés. C’est normal dans bien des coins de New-York et il le savait bien, mais ils venaient inévitablement avec des kiosques ambulants de nourriture qui ne semblaient jamais fermés.

Il s’approcha sans s’en apercevoir d’un de ceux-ci pour sortir d’un geste mécanique son cellulaire, recherchant le réseau du coin. Il s’était rangé pour être le plus loin possible si quelques personnes venaient à passer mais s’était plutôt rapproché d’un petit vendeur de trottoir qui ne mit pas de temps à l’interpeller.

VENDEUR ▬ Alors mon bon monsieur, un de mes hot dog vous intéresserait? Vous allez bien toujours, vous ne me semblez pas en bon état...

Hot dog, aussi appelé mal bouffe américaine numéro deux tout de suite après le hamburger, que Zakhar à eu beaucoup de mal à prononcer au début, du aux deux r qui s’y sont malencontreusement resté coincés pour ne former qu’un seul et unique mot. Il était bien évident qu’il n’allait pas dire oui, n’appréciant pas tellement ce genre de nourriture et n’ayant pas envie de casser la croute pour l’heure. Déjà que chez les Morlocks un gout un peu trop prononcé s’était développé pour le fast-food, facile d’accès et pas cher qui réussit généralement à vous combler pendant un bout, il n’irait certainement pas en chercher de par lui-même.

Au final le pauvre monsieur ne reçut qu’un regard glacé pour avoir simplement posé une question toute banale, le teint du Russe ne le rassurait pas tellement sur son état de santé. Peut-être était-il simplement drogué, oui, ça expliquerait au moins les pupilles qui semblaient prendre une teinte un peu trop rougeâtre dans ce début de pénombre.

ZAKHAR ▬ Non.

S’il allait bien? Pourquoi répondre, il n’en savait rien. L’année commençait à peine qu’elle promettait déjà de lui geler l’ensemble complet de la peau quoi qu’il en fasse, ajouter à cela le système wi-fi qui ne se trouvait plus dès les premiers jours de Janvier. Ce que c’était embêtant, tout ça pour principalement écouter de la musique et la télécharger sur son cellulaire. Un portable serait mieux mais oh combien moins pratique. Il s’éloigna tranquillement du kiosque à nourriture légèrement trop grasse, ne venez pas vous demander pourquoi les américains sont obèses après, pour emprunter le trottoir comme le veut les bonnes manières, les yeux rivés sur l’engin qui ne trouvait décidément aucun réseau. Aucune logique, il y a bien des jours où il captait dans les sous-sols et là plus rien.

En élevant légèrement le bras une barre apparut finalement. S’il montait encore un peu peut-être réussirait-il. Cependant il ne put vraiment aller plus loin puisque pris dans sa contemplation du système technologique à problème tout en marchant, il ne regardait plus vraiment où il allait et en déduisit qu’il fonça dans quelqu’un lorsqu’un liquide bouillant lui aspergea le haut du corps. Au moins sa peau gelée ne le serait plus de partout, c’était un avantage. L’inconvénient c’est que ça brule, aussi dût-il se mordre la lèvre inférieure pour ne rien en laisser paraître, et que les propriétaire de café qui se retrouvent ainsi gaspillés sont très souvent en colère après un tel coup. Le problème c'est que pour une fois il était en tort.

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Et voilà en quoi c’est extrêmement chiant une collision à l’improviste alors que le soleil tombe au loin. Non, cela n’a rien à voir avec le soleil, plutôt la situation globale, comprenant le machin en face du Russe et le café qui s’était renversé, encore heureux que le cellulaire ne lui ait pas échappé. Le temps d’une seconde le mutant prit le temps de réfléchir à l’idiotie de la situation. Il devenait un peu trop clair que son cellulaire se faisait vieux, n'arrivant à capter qu’une fois sur deux désormais dans une ville très mégalopole comme New-York, mais l’argent pour en avoir un meilleur se faisait rare, voire inexistant ces temps-ci... Cependant s’il en avait possédé un il n’aurait pas eu à s’embarrasser de la sorte devant n’importe qui. Ce ''qui'' d’ailleurs était un adolescent bien typique à ce qu’il en déduisit en quelques secondes, du moins un blondinet comme on en trouve tant, avec un petit quelque chose d’un peu moins américain, quoi que loin d’être espagnol. À moins que ce ne soit là qu’une impression, aussi il n’en fit pas un cas, peu importait en cette situation de quel coin il venait, que ce soit un simple touriste ou encore qu’il vive tout près.

INCONNU ▬ Pardonnez-moi. Je ne vous avais pas aperçu. Je suis sincèrement désolé…

Ils étaient tous les deux dans ce cas-là, les deux fautif de ce malheureux incident, et pourtant il ne se fondait pas en plates excuses. C’était ça la coutume qui était en vogue désormais? Deux tarés à se relancer sur qui la faute et sur qui devrait être désolé de ce terrible incident? Décidément son côté sociopathe n’était jamais parti et ce même en s’isolant, n’aillant pas apprit à vivre en société et bien loin de là. Il réfléchit quelques secondes, il allait surement devoir lui-même justifier le fait qu’il ne regardait pas non plus où il trainait les pieds. Quoique donner la raison serait ridicule, c’en était l’évidence même. Le blondinet bizarre lisait un livre et lui regardait son cellulaire. Voilà. Après il faisait froid et le breuvage finirait par geler, et ce sur ses vêtements complètement trempés, les vêtements de rechange étant loin, très loin de là. Le froid serait impitoyable avec lui, il le sentait bien.

INCONNU ▬ Ne vous en faites pas pour votre veste. Je vais vous dédommager. C’est la moindre des choses après tout.

Choix numéro un la moindre des choses avait bien changé depuis qu’il était plus jeune et personne ne s’était donné la peine de l’en avertir, ce qui était bien possible. Auparavant c’était du chacun pour soi et si un accident pareil t’arrivait on se payait bien ta tête, ce qui lui arriva plus jeune à quelques reprises. Choix numéro deux, il était tombé sur la toute première poire, sans compter la pire, facilement manipulable que ce siècle ait engendré. Et la deuxième option semblait un peu trop évidente à ses yeux, à voir comment ce petit machin ne semblait pas bien gérer la situation.

Il ne pouvait pas rester de marbre devant ces paroles qui se voulaient gentilles, essayant de se détendre un peu, oubliant par moment ce que c’était de discuter avec quelqu’un. Dédommager une veste? Pour être raisonnable avec son budget et son mode de vie il trouvera sans doute le moyen de la laver tout banalement, ce n’était pas son genre de faire affaire avec un nettoyeur. En racheter une autre? Pour l’instant il n’en voyait pas l’absolu, l’argent pouvait servir à tellement mieux en cet instant, et la chance voulait qu’il s’habille en noir. Avec un peu de chance plus rien n’y paraîtrait.

Zakhar pourrait prendre l’argent pour s’acheter un nouveau cellulaire beaucoup plus performant que celui qu’il possédait, mais la différence était bien trop significative et il n’avait pas encore le restant pour faire un tel achat dans l’immédiat. Parlant de cellulaire, il rangea le sien instinctivement dans ses poches, loin des accidents potentiels qui pourraient survenir tout près de cet énergumène. On ne sait jamais. L’option la plus respectable était de se faire offrir à manger, commençant à avoir faim somme toute. Mais pas un fast food. Et ne pas dire restaurant, il y avait dans ce mot un peu trop de R à son gout.

ZAKHAR ▬ Disons un rrrepas et on oublie l’affairrre.

Ce n’était pas tellement bien ce qu’il faisait, profiter d’un blondinet qui semblait un peu trop naïf pour manger un repas qui aurait de l’allure pour une fois. Mais quand on a faim, qu’y peut-on? Le pire qui pourrait arriver c’est qu’il le confonde avec un sans-abri, pas tellement faux dans un sens, qu’il en ait pitié et lui balance plein d’argent pour l’aider dans un élan de bonté inexpliqué. Et à lui un nouveau cellulaire, à quoi vous vous attendiez d’autre? Oui mais non, ne faut pas exagérer non plus. Un repas ferait l’affaire et après plus jamais il n’entendrait parler de ce jeune homme, il aurait la paix et lui aussi. Digne des films de Disney mais en un peu plus kitch.

Tant qu’on ne pense pas en les voyant à un détournement de mineur. Il avait quoi, quinze, seize, dix-sept ans? Tandis que lui était adulte depuis un moment déjà, surtout qu’aux États-Unis il s’agit de 21 ans l’âge où on est considéré comme un adulte. Et de nos jours tout le monde panique dès qu’un adulte traine avec un mineur, surtout en pleine nuit. Éviter au moins les coins du genre bar, ça évitera les crises hystérique qu'il n’était pas capable d'endurer.

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Du coin de l’œil il vit bien l’étranger qui marquait la page de son roman, décidant sans aucun doute de reporter sa lecture à plus tard. Apparemment et omis que cela soit pratiquement contre le bon sens, il semblait enclin à accepter sa demande, et donc à lui la nourriture parfaitement gratuite et sans avoir à lever le petit doigt, simplement a profiter de la naïveté apparente d’un môme à la tignasse pâle. Vraisemblablement dans cette histoire il était le grand méchant de la série et lui la pauvre petite victime innocente qui allait devoir débourser.

Il aurait dû quelque part à l’intérieur de lui se sentir très mal à l’aise avec la situation et lui expliquer qu’il était bien gentil mais qu’au final il allait devoir refuser tant de gentillesse, un truc du genre quoi, et s’en aller sans plus d’histoire. Le problème c’est que même s’il s’y était essayé il n’aurait pu ressentir de remords. Les raisons sont simples, il a demandé à le dédommager, il a demandé un repas. Il ne lui a pas tordu un bras non plus. Tout s’est passé d’une façon étonnamment conviviale, étonnamment puisque dans un sens il ne se serait pas attendu à cela de sa part. Avoir demandé ainsi banalement un repas, oui, mais que cela finisse ainsi non.

INCONNU ▬ Je connais un petit café bien sympathique où vous y trouverez une petite variété de plats bien délicieux. Laissez-moi vous y mener, l’établissement se trouve tout près d’ici.

La première chose troublante dans cette phrase c’était le vouvoiement qu’il lui adressa d’une manière très spontanée, sans même réfléchir comme la plupart des jeunes semblaient le faire avant de s’adresser à un adulte, parfois dans la crainte de se faire réprimander suite à une telle formule de politesse. Si le russe ne parlait pratiquement jamais aux personnes, s’il avait le malheur de devoir le faire il tutoyait ou ne s’adressait pas directement à la personne, utilisant un plan très impersonnel en répondant souvent de façon très brève.

Certes il était plus vieux que le jeune garçon qu’il venait de percuter, de quelques années seulement peut-être bien, mais plus vieux tout de même. Cela ne signifiait pas pour autant qu’il se trouvait dans un âge très avancé non plus. Il avait le don de renforcer le stéréotype que Zakhar lui attribuait rapidement et ce bien malgré lui, se donnant un air de petit garçon gentil et sage, complètement naïf et qui tomberait rapidement dans les pièges des kidnappeurs d’enfants. Oui, voilà l’impression qu’il lui donnait.

Il suivit sans plus de manière le garçon qui semblait bien sûr de la direction à prendre, peut-être y allant régulièrement qui sait? Il ne le regarda pas trop texter, c’est une fonction qu’il n’utilisait pas lui-même. Oui bon, faute de n’avoir personne avec qui envoyer des messages mais surtout parce que ce n’était pas l’utilité principale de son propre cellulaire, à la fin. Il savait par contre que c’était rendu très à la mode, pour les moindres fois où il sortait et voyait quelques personnes marcher à tâtons, concentrée dans la rédaction de leurs textos.

ALEXÏS ▬ Pardonnez-moi de ne pas m’être présenté plus tôt. Je me nomme Alexïs.

Le cadet des Nikonov soupira, s’attendant presque à ce que cette information arrive sur le tapis un peu plus tôt. Personnellement cela lui était rarement utile mais il semblait dans la mentalité des gens que c’était crucial à toutes rencontres. Alexis c’est presque multilinguistique comme nom, aussi ça ne lui indiquait pas réellement sa nationalité. Pas que cela l’embêtait, simplement une pensée qui lui trottait par moment dans la tête.

Alors que le jeune homme lui indiquait la direction, presque heureux d’avoir trouvé quelque chose qui lui plairait bien et sans doute à lui aussi, il se décida enfin à répondre, question de savoir vivre surtout et parce qu’il offrait le repas. En évitant soigneusement le nom de famille, il le sentait malheureusement capable de lui sortir un ‘’monsieur Nikonov’’ pendant tout le reste du repas, ce qui serait assez embêtant à la longue.

ZAKHAR ▬ Ne t'en fais pas pourrr ça... Je me nomme Zakharr, enchanté.

Enchanté était sans doute de trop, mais au moins il n’aurait pas trop l’air marginal, déjà que fondamentalement il l’était tout de même assez, un pouvoir de mutant ce n’est pas assez bizarre à votre goût ça? Sans compter qu’il ressemblait à un mort, sa peau s’amusant un peu trop à prendre la même température que ceux-ci. En autant que tout cela semble naturel il ne devrait pas trop y avoir de problème.

En effet le café n’était pas loin, ayant marché bien moins que ce qu’il croyait qu’il aurait à faire, et ils s’installèrent dans le fond de la salle sans doute pour des questions de température. Il serait marrant par moment de savoir ce que les gens ont en tête en prenant certaines décisions des plus banales. Zakhar ne parlait plus, déjà il n’avait rien à dire, regardant distraitement autour le décor assez accueillant de l’établissement avant de prendre place à son tour. La dame au menu aurait pu le faire sursauter s’il ne l’avait pas vu arriver d’avance et s’était préalablement un peu éloigné de l’endroit où elle resta immobile, leurs tendant les menu. Elle disparut bien vite, ne sembla pas remarquer ce léger détail, soit le fait qu’il sembla vraiment éviter qu’elle ne le frôle. Tant mieux. Il n’aimait pas qu’on le touche, encore moins quand il avait les mains à ce point gelées.

Tout ce qu’il y avait pouvait être appétissant, mais son choix se fit bien vite, refermant doucement le menu pour le poser. Même un sociopathe très profond, ce qu’il n’était pas entièrement, peut savoir que le meilleur moyen de signifier aux greluches qui servent que notre choix est fixé.

ZAKHAR ▬ Tu prrrendrras quoi?

Et là se plaçait surtout une politesse pour voir les spécialités de l'endroit, vu qu'il devait venir souvent pour connaître bien le petit établissement.
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Ses yeux d'une teinte rougeâtre parcouraient lentement le menu, alors qu’il venait de poser la question à Alexïs, écoutant distraitement tout en suivant les mots imprimés du regard. Dans un café, il préférait souvent choisir un plat d’accompagnement en début puis un bon dessert qui rehausserait le gout du café qui, quand on est intelligent, est choisi selon nos gouts. Il y a ceux qui ne vont dans les cafés que pour les desserts, ça aussi ça existe, ou pour jaser autour d’un petit repas simple et économique. Parfois par moment, lorsqu’il n’avait pas à endurer le gout du fast food prisé dans ces égouts, il savait avoir bon gout en ce qui concernait la nourriture. Beaucoup de repas suggérés semblaient être plutôt destinés pour ceux aimant se remplir la panse et utiliser le café en accompagnement, ce qui était tout aussi faisable. Durant un moment rien ne semblait l’intéresser jusqu’à ce que… [Insérer un suspense complètement inopportun et sans aucun but par ici]

ALEXÏS ▬ Je dois vous avouer que je ne sais toujours pas ce que je pourrais commander. J’ai testé bien des mets ici et ils se sont tous avérés délicieux. Leurs paninis ont toujours été bien simples, mais savent nous remplir l’estomac. Je crois, finalement, avoir déterminé ce que j’allais commander : deux wraps ainsi que la soupe du jour. Avez-vous finalement arrêté votre choix sur un plat ?

Sans aucune surprise ses oreilles cillèrent à cette longue phrase avec des vous et des temps de verbe pratiquement en voie d’extinction tant on ne les entendait plus, sans compter une manière de s’exprimer singulière, semblant presque intimidé par sa présence. Ça ou bien il venait d’une famille noble perdue dans les boisés inquiétants de la Zimbabwe et il venait d’atterrir dans un monde où les gens ne savaient plus parler, gâchant à belle beurrées leurs langues maternelles d’expressions et d’abréviations.

Il se concentra un peu plus sur les choix proposés par le jeune homme au teint plutôt clair pour un américain, sans oublier qu’il n’était pas obèse [C’est bien connu, les américains sont gros, non?]. Paninis, wrap, c’est pas très singulier, il y en a partout. Les starbuck cafe, qui pullulent New-York comme des rats d’égout et ce depuis des années au point où on ne peut même pas ignorer le nom de ce commerce, en font leurs spécialités, tout comme la franchise Tim Horton bien plus au Nord de New-York. Ce n'était donc pas ça qui l’intéressait particulièrement à gouter.

Il retourna vers son choix de tout à l’heure, oui celui qui a eu un suspense de fou, réfléchissant encore un peu avant d’être bien sûr qu’il en avait envie. De toute façon si jamais il n’aimait pas il y a toujours de succulents désert dans les cafés, c’est bien connu, mais le nom lui indiquait d’ores et déjà qu’il allait aimer, et l’image qui l’accompagnait lui faisait presque monter l’eau a la bouche. Presque. Mais après essayez de dire ce mot en évitant les r. Impossible.

ZAKHAR ▬ Je vais prrendrrre les auberrrgines farrrcies.

Il continuait à regarder discrètement la description du plat sur lequel sa décision semblait s’être posée. Entre aubergines farcies et celles à l’italienne, le choix avait été dur, mais les tomates gardaient toujours un gout amer qui rendait le café un peu plus… Mauvais? D’un autre côté les italiennes ajoutaient le gout du mozzarella qu’il appréciait bien. Tant de choix compliqués à faire et ce rapidement, sans oublier le choix du café qui marierait le tout merveilleusement bien. Après tout il aurait dû devenir cuisinier et y faire carrière au lieu de tout banalement aller s’exiler sous terre, non mais! C’était ironique bien entendu et comme vous êtes tous intelligent vous l’aurez tous compris. Sans oublier que les aubergines peuvent être prises tant comme repas que comme accompagnement, un autre problème à trancher. Pour sa part il n'avait pas assez faim pour prendre un vrai gros repas, mais bien pour prendre une bonne entrée, un café puis un dessert. Voilà une bonne chose de décidée.

Alors qu’il fixait un peu plus loin pour la voir arriver à l’avance, la greluche de serveuse se ramena, et Zakhar s’arrangea pour qu’elle reste à une bonne distance de lui, en s’étant préalablement éloigné. C’est ça le problème avec les gens qui travaillent avec le public, ils veulent souvent trop en faire, sauf bien entendu pour ceux pour qui leur travail ne leur tient pas à cœur. Ça arrive un peu trop régulièrement me direz-vous. Au moins elle n’était pas envahissante et savait se tenir, c’était là un aspect positif que le russe nota pour lui-même.

Le blondinet passa sa commande, wraps et café comme il lui avait mentionné un peu plus tôt, et, pour sa part, demanda brièvement les aubergines farcies avec un cappuccino frappé au caramel, ayant choisi ce dernier un peu à l’improviste n’ayant aucune idée au départ de ce qu’il pourrait bien prendre comme breuvage. Elle partit après avoir tout noté, ce n’est pas comme si il y avait beaucoup de choses à retenir non plus, sans rien ajouter ou passer quelconque commentaire. Il valait mieux ainsi. À cette heure, la clientèle allait généralement de bon train, les amis cherchant un coin paisible où discuter au chaud sous un breuvage. Elle allait sans doute être débordée sous peu et n’avait pas le temps de trop accorder de temps à chaque client.

ALEXÏS ▬ Vos yeux sont particuliers. Leur couleur est à la fois intrigante et magnifique. Feriez-vous partie de ceux qui portent des lentilles colorées ?

Gay.

Zakhar ne connait pas grand-chose en fait de gay. Il y a des parades gay très fréquemment dans le coin de Manhattan, des marches gay un peu partout dans New-York et des gays à profusion. Le terme gay, ce n’est pas compliqué à saisir, l’attirance vers le genre masculin non plus, ne niant pas lui-même ne ressentir strictement rien envers les femmes, mais agir comme un gay et parler comme tel, faut le faire. Et c’était sorti si spontanément en plus!

Malheureusement pour le machin qui n’avait surement pas pensé mal faire en parlant ainsi, c’est la première chose que ça lui alluma fortement et il essaya tant bien que mal de ne pas changer d’expression pour ne rien en laisser paraitre. Non seulement gay mais fif. Qui, de genre masculin et de façon sincère, dirait à un homme qu’il ne connait pas que ses yeux sont intriguant et magnifique?

Il espérait bien que la réponse soit personne. Zakhar n’était pas homophobe mais bien sociopathe, il y a une bonne différence. Et quand il se décide a sortir, il se fait draguer par un mineur louche qui croit que des yeux teintés d’une couleur absurde sont un bon sujet de conversation pour avouer son homosexualité.

ZAKHAR ▬ Non, je ne porrrte pas de lentille. C’est ma couleurrr naturrrelle, au déparrt ils étaient bourrgogne tout simplement.

Pour en revenir au sujet du gay… C’est considéré comme de la pédophilie si un mineur vous fait des avances? C’est embêtant, il allait devoir se dépêcher de finir de manger pour partir. Mais ça allait durer, il le voyait venir. Les yeux de l’autre machin étaient bleus, très beaux yeux d’aill—VOILA c’est clair, les propos gay sont contagieux. Et lui avec sa longue veste noire et son teint de cadavre il aurait tôt fait d’avoir des problèmes de préjugés s’il parlait de la sorte. Bon, il a des yeux bleu, et puis après? Tous les mannequins d’Hollywood en ont des pareils.

La serveuse revint à temps heureusement, avant que ces pensées qui ne tenaient pas debout persistent, leurs apportant d’abord leurs breuvages respectif puis leurs repas, s’en allant ensuite avec un grand sourire après s'être assurée qu'il ne manquait rien à cette table-ci. Non il ne manquait absolument de rien, aussi il pourrait éviter de regarder directement le blondinet en occupant son regard sur la nourriture. Quelque chose eut la décence de lui rappeler par contre que manger devant quelqu’un sans rien dire d’abord ce devait être impoli, et c’est rare qu’il l’ait, cette pensée, Alexis pouvais se compter chanceux.

ZAKHAR ▬ Bon appétit.

Encore une politesse de mise qu'il n'avait pas oublié avec le temps, les ayant apprises à la longue dans son enfance mais n’ayant plus eu à les utiliser depuis un bon moment. Il s'était toujours dit qu'il ne pouvait vivre en société et c'était bien vrai, mais il ne faisait pas trop mauvaise figure jusqu'à présent, du moins il s’y efforçait. Rester naturel, il n’aurait rien dit et aurait mangé, comme quelqu’un qui a faim et qui s’assume. En ce moment il y avait le facteur qu’il ne payait pas, ça aide à retrouver des coutumes qui sont acceptées en société. Enfin sauf que maintenant l'adolescent avait un panneau écrit ''fif'' en gros au-dessus de sa tête. Il ne faisait pas exprès, les circonstances l'obligeaient à maintenant le voir comme tel, ça et le fait que potentiellement parler de ses yeux ainsi, c'est de la drague ouverte. Tant qu'il ne lui en sortait pas une autre ainsi.

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Il y a beaucoup de différences entre les Américains et les Russes. Ils ont beau dire que la Russie commence peu à peu à devenir capitaliste suite à l’éclatement de leurs système, grâce entre autre au commerce du pétrole qui fait rage dans tout le pays, mais certains points le laissaient froid sur cette idée. La Russie ayant livré guerre durant des années contre les États-Unis, fier défenseur du communisme, Zakhar doutait encore d’une telle possibilité. N’avait-il pas connu personnellement un soldat de la Russie qui avait vécu ces douces années de confrontation, d’occupation d’une bonne partie de l’orient sous le système communiste ainsi que de Cuba pour tenter d’éliminer l’ennemi génétique des russes; Les américains?

Impossible que l’histoire ait oublié tout ça en a peine quelques années, sans oublier les conflits et les guerres internes vis-à-vis eux-mêmes, fiers habitant russe. Si réellement ces Ruskovs l’oublient, jamais son père ne passerait à autre chose et il serait toujours là à hanter ses enfants en pensées pour qu'à jamais les fantômes des guerres passées ne les quittent. Ironique quand les deux habitent désormais dans ce pays tant haï. Ils l’avaient bien mérité.

En contre partie vivre avec les américains le troublait souvent. Le royaume du fast-food, c’est un peu l’image que l’on se fait d’eux et c’est, pour le moins qu’il puisse en dire, une image vraie. Ils sont gros, gras, et visent l’instantané. Il est rare de voir ces restaurants typique où tu t’assois sur tes fesses et attends sagement d’avoir à commander un repas et de le recevoir. Tout est fait au comptoir désormais et il s’étonnait presque de ne pas avoir été emmené dans un de ces genres de restaurants qui vont désormais même cogner à votre porte pour livrer marchandise.

Les préjugés viennent des stéréotypes et les américains sont très mal stéréotypés, dans le sens où mondialement on a une très mauvaise opinion d’eux. Les russes aussi il faut dire. Et ce raisonnement-là ne partait dans la tête du Nikonov que du simple fait qu’il mangeait dans un restaurant, et forcément ce jeune-là donc n’était pas natif des États-Unis. Tout ça pour en arriver là, et oui. Il s’essaya mentalement à deviner sa nationalité.

Il ne pouvait pas être Africain, ayant la peau trop pâle pour être un habitant à la pigmentation blanche de ce continent. Il ne devait pas venir de l’Amérique du Sud ou du centre non plus, semblant avoir vécu une vie assez aisée si l’on compare à ces endroits et encore moins d’un pays Asiatique. Peut-être venait-il du Québec, ce qui expliquerait au moins son tout léger accent en anglais ou alors dans un pays de l’Europe de l’Est. La Croatie où la Serbie, il en doutait fort, tout comme la France. L’Allemagne ou encore la Pologne pourrait le faire, se basant malheureusement à la couleur pâle de ses cheveux. Il ne le demanda pas pour l’instant, préférant essayer de se faire une idée par lui-même.

ALEXÏS ▬ Il doit s’agir d’une question de génétique, alors. J’ai fait quelques recherches là-dessus et je dois dire que c’est un sujet extrêmement passionnant.

Un gay passionné de génétique. Ça promettait, à coup sûr il avait déjà identifié le gêne de l’homosexualité pour l’amplifier davantage. La phrase avait été dite il y a quelques minutes, suivie très rapidement par la livraison du repas. Il continua de garder le silence tout en continuant doucement de déguster son repas bien chaud qu’il avait entamé à peine que les souhaits de bons repas avaient été annoncés. En y repensant à deux fois, la mutation est un gêne aussi, sans doute au même titre que l’homosexualité – Quoi qu’il n’en savait rien sur ce point, gêne ou pas, maladie ou pas? Dans un sens il s’en fichait, n’étant pas style à juger, sauf quand l’excès de féminité saute à ce point aux yeux.

Le silence fut bientôt brisé et il se dit qu’il aurait sans doute préféré qu’il ne se brise pas, vu les paroles qui suivirent. Rien contre la gentillesse maladive du jeune blondinet, simplement ça en devenait presque étouffant surtout lorsque l’on déguste un bon café avec un bon accompagnement.

ALEXÏS ▬ Que faites-vous dans la vie, Zakhar ?

Et bien moi vois-tu, je vis dans les égouts, je cherche de temps à autre du réseau pour continuer de downloader des chansons que j’écoute par la suite en boucle, soit cela soit je dois aller le recharger. Sinon je vis avec une bande de mutants peu fréquentable et on peut tout aussi bien me rentrer dans cette catégorie. Et oui je suis un mutant, je vis exclu de la société, et y a toujours de la bonne pizza si le cœur te dit de venir nous voir. Crédibilité et ridicule assuré. Non, il allait devoir trouver autre chose et rapidement pour pas avoir l’air con. C’est pas dans ses habitudes de mentir non plus mais il n’en avait pas trop le choix s’il voulait le repas payé, une fin rapide à la discussion –surtout ce sujet précisément- et repartir à la recherche de réseau.


Qu’est-ce qu’un américain de son âge ferait exactement en ce moment dans la vie? La réponse était trop simple, elle lui vint pratiquement d’elle-même; Étudiant, se préparant à devoir aller faire ses années règlementaire à l’armée. Enfin il ne savait plus trop si cela se faisait encore, mais petit c’était les belles histoires pour s’endormir la nuit que son père lui racontait. Et si cela ne se faisait plus, il croirait simplement qu’il se passionnait pour l’armée. Faux, d’ailleurs, tellement faux qu'il décida banalement d'oublier ce point stupide.

ZAKHAR ▬ Étudiant à l'univerrsité de New-Yorrrrk en trrraduction. Et toi?

Cette idée était un peu amusante en y réfléchissant bien. Il connaissait et maitrisait le Russe et l’anglais, avait quelques notions de langues çà et là, mais de là à être traducteur. C’est cependant le seul truc qui lui était venu à l’esprit, ça et neurologue mais à coup sûr il lui aurait posé des questions sur les gênes, questions auxquelles il n’a pas réponse, ne connaissant absolument pas le domaine. Déjà la question de la couleur de ses yeux lui échappait totalement, sans doute qu’Alexis comprenait déjà mieux en quelques secondes que lui en vingt-et-un ans.

Il avait beau en penser autrement, sans aucun doute que ce petit gars était très intelligent, ayant forcément plus d'étude que lui. Quoi que Zakhar n'en ait rien à cirer, s'il avait réellement voulu reprendre les études il l'aurait fait, mais l'école n'avait jamais bien fonctionné pour lui. Les égouts passent toujours mieux, c'est bête ainsi.

ZAKHAR ▬ De quel nationalité est-tu?

Enfin une phrase composée sans R, il était temps. La langue Russe est faite pour que les r soient roulés, pas la plupart des autres langues, ce qui rend embêtant de communiquer dans une langue autre que la sienne sachant pertinemment que tout le monde note l'accent étranger.

Posant ses doigts de nouveaux frigorifiés sur la tasse de café, les réchauffant alors qu’il portait un moindre attention aux paroles que répondait Alexis, celui-ci se demanda s’il allait chipoter avec d’autres questions. Certes il savait où était l’université de New-York, comment s’y rendre, de quoi elle avait l’air brièvement. Mais en quoi consistent les cours de traduction il n’en avait qu’une brève idée, à cela ajouter le fait que jamais il n’avait fait d’études supérieur, que des images cliché de bien des films. Dieu sait à quel point c’est loin de la réalité.
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Le mutant garda le silence alors que blondinet gay élaborait son cheminement de carrière future. Dans un sens cela ne l’intéressait nullement, il n’avait pas envie d’entendre l’élaboration d’un cheminement d’une vie entière en quelques minutes, surtout de la part de ce gamin et de l’autre sens il avait vraiment la discussion facile, à coup sûr il aurait été simple de lui faire raconter les moindres parcelles de sa vie. La médecine ce n’était pas tellement son truc qui plus est. Dans ses jeunes années où les cours étaient obligatoires dans une certaine tranche d’âge, les cours de sciences avaient été une catastrophe et il n’arrivait jamais à retenir quoi que ce soit de ce que l’enseignant tentait de leur apprendre. Dès le premier volet sur les parties de la cellule, les machins qui se trimballent partout dans le corps, Zakhar avait décroché et au final n’avait pas été capable d’en retenir quoi que ce soit, même si ça s’applique aussi pour pratiquement toutes les matières à l’école.

Même en sport, plus jeune, il était un bon a rien. Ça avait changé au fil des années mais auparavant il était fétiche et sans une once de graisse. Avec un peu de motivation il se bâtit un peu de muscle, mais la graisse ne se fit jamais voir. Le poil non plus, d’un sens il n’a pas a se faire la barbe, il devrait pourtant être content, mais dans ses années d’adolescence ça l’avait bien frustré.

L’intérêt qu’Alexïs porta à ses paroles - qui visaient uniquement à échapper à cette question - aurait peut-être dû l’inquiéter davantage mais son détachement face à la situation l’en empêchait. Qui il était et ce qu’il faisait dans la vie, au final, il n’en avait rien à cirer, encore moins ce qu’il pensait désormais de lui, soit un étudiant en langue. Il ne le reverrait pas, après ce repas tout payé. Au pire si les questions continuaient de la sorte il ne saurait pas tellement quoi répondre et improviserait avec ses expériences antérieures, même si cela ne paraissait pas toujours il avait tout de même une vingtaine d'années derrière lui.

ALEXÏS ▬ Je suis originaire de la Russie. Cependant, j’ai passé la majeure partie de ma vie dans cette ville. Puisque vous avez abordé le sujet de la nationalité, puis-je retourner votre question et vous demandez d’où vous êtes originaire ?

Voilà qui était un peu plus intéressant, ce machin blond venait donc de la Russie, soit son pays et sa nation à lui aussi. Au moins il avait raison sur le point qu’il venait forcément de l’Europe du Nord-est ou dans ces environs. Il n’aurait pu le deviner, cependant, puisqu’il ne semblait pas avoir d’accent récurent dans sa langue, pas au point où il aurait pu le déceler, au point où il aurait plutôt cru à un Hongrois avant de même penser à un Russe. De quel coin de la Russie exactement, s’agissant du pays le plus vaste au monde, il l’ignorait, mais sans doute pas le coin plus orientale, sans quoi il n’aurait pas la peau, les yeux et les cheveux de cette couleur.

ZAKHAR ▬ Je viens de la Rrrusie de l'Est, prrrès de la frrrontièrre Norrvégienne. De quel coin de la Rrrusie exactement?

C’était sans trop réellement s’en rendre compte que la discussion avait peu à peu pris forme, la preuve : il se surprenait même à poser une question pour relancer le jeune homme quand pourtant il était bien certain de ne pas avoir envie de le savoir. Peut-être que rester silencieux en mangeant aurait été mieux, mais le petit machin semblait tellement enthousiaste à parler qu’il l’avait un peu emporté sur son idée de ne rien dire du tout. Bon certains trucs n’étaient que mensonges mais au moins pas l’endroit d’où il venait.

Dans un léger mouvement, après s’être encore assuré que son cellulaire restait bien dans ses poches, celui-ci posa distraitement ses coudes sur la table pour continuer de manger. À ce stade-là il lui était impossible de continuer de bien paraitre. Ça l’avait démangé dans son côté sociopathe, étant bien plus confortable pour manger ainsi. Après si ça l’insultait tant pis, il n’en était plus capable.

ALEXÏS ▬ Par pure curiosité, combien de langues savez-vous parler ? En traduction, vous devez en apprendre plusieurs, non ?

Oups. Oui, oups, parce qu’il ne parlait que Russe et Anglais, avec quelques bases simples d’allemand qu’il tenait de son enfance. L’alliance de la Russie avec l’Allemagne ayant grandement influencé son pays d’origine et surtout la mentalité extrémiste de son père, il n’avait pas eu le choix d’entendre cette langue très saccadé et loin d’être mélodieuse, surtout que la plupart de ce qu’il avait entendu en cette langue ne concernait uniquement la politique et les mouvements hitlérien. Rien de bien bien joyeux en bref.

Au moins il connaissait d’autres langues de noms, de près ou de loin, assez pour pouvoir improviser quelque chose sur cette question d’assez crédible pour ne pas avoir à répondre ‘’non en fait je t’ai menti pour ne pas avoir à dire que je vis sous les égouts, tu vois le genre’’.

ZAKHAR ▬ Je maitrise le Russe, l'Anglais et l'Allemand. Je suis présentement en train d'apprendre le Français, mais je compte faire une spécialisation pour traduire du Russe à l'anglais.

Du gros n’importe quoi, vous l’aurez bien compris, alors que son repas s’était terminé et que son breuvage commençait peu à peu à diminuer, se forçant à en garder pour le dessert. Oui, parce que le dessert c’est important, du moins pour lui, et ça fera monter la facture du petit machin aux études et forcément pas riche. Un new-yorkais, la seule spécialité qui valait généralement le détour, avec coulis de fraise supplémentaire et fraises fraiches. Il allait simplement devoir attendre la nunuche de serveuse qui passait de façon aléatoire voir si tout allait pour le mieux. Bon, les fraises aussi ça fait gay. Mais au moins c’est bon.

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Moscow, ce mot lui fit un drôle d’effet, surtout cette apparition de russe dans une phrase dites et prononcée dans un très bon anglais, ce n’est pas quelque chose de très habituel. Ça lui rappela des souvenirs, pas nécessairement des bons, l’espace d’un instant. Il y avait vécu il y a longtemps, environ de ses dix à quinze ans à sa mémoire. Ce n’était pas son coin préféré de la Russie mais il s’y était accommodé, pas le choix. Enfin accommodé c’est un bien grand mot, son corps en gardant encore quelques cicatrices, ses dernières surement que son corps eut à écoper avant de bien apprendre à se défendre. Aujourd’hui ce n’est plus là des choses qui pourraient arriver, sans bien sûr que quelqu’un en paie le prix. S’il était difficile d’énerver Zakhar, il ne se laissait pas non plus marcher sur les pieds. Un léger rictus d’agacement fila sur son teint cadavérique mais il tenta de ne rien laisser paraitre. Pour réussir à penser à autre chose, son cerveau lui imposa systématiquement une chanson de System of a Down qui lui collerait au crane le reste de la soirée et ce tant que son cellulaire ne réussirait pas à trouver du wi-fi pour lui faire écouter autre chose. Ne lui demandez pas de chanter, les r seraient massacrés, ainsi que vos oreilles au passage sans aucun doute. Bon il n’était pas si mauvais chanteur, mais l’accent et la langue anglaise ne lui collaient pas du tout à la peau.

She's scared that I will take her away from there
Her dreams and her country left with no one there
Mezmerize the simple minded
Propaganda leaves us blinded

Ses yeux restèrent un peu rivés sur son repas, alors qu’il essayait de se rappeler ce qu’il lui avait demandé exactement. Depuis combien de temps il se trouvait ici? Il y avait déjà quatre ans qu’il avait quitté son pays natal, cependant il n’avait pas tellement communiqué avec les gens du coin et l’accent ne lui rentrait tout simplement pas en tête. Même sans avoir parlé depuis longtemps il savait encore parfaitement parler le Russe et cette langue n’avait jamais voulu le quitter, lui donnant incessamment un accent et un roulement de R que tous les russes acquièrent en apprenant à parler.

La différence majeure entre un psychopathe et un sociopathe c’est que le psychopathe né ainsi, le sociopathe le devient. C’est en Russie que tout s’était joué pour Zakhar, là qu’il était un peu devenu qui il était. Il n’avait aucune attache en Amérique et pourtant il y restait, c’était à ne rien y comprendre.

ZAKHAR ▬ J’ai quitté la Rrrussie il y a envirrron quatrre ans.

Le sujet changea rapidement, et le gay –ou du moins le garçon au physique peu avantageux pour une orientation hétérosexuelle et aux manies complètement énervantes qui se rapprochent fortement aux tics des gays extrêmes désireux de démontrer leurs féminité- montra son admiration aucunement dissimulée pour les langues, chose selon Zak complètement futile et inutile à préciser, il aurait sans doute pu le deviner à voir son caractère et à entendre ses propos d’auparavant. Le russe aux yeux ''intriguant et magnifiques'' n’écouta que d’une seule oreille alors qu’il essayait toujours de se retirer cette musique de la tête. Peine perdue elle ne décrochait pas une seule seconde alors qu’Alexis semblait chercher la serveuse du regard. Quant à lui elle était mieux loin, il ne l’aimait pas tellement, pas plus qu’il n’appréciait la présence des gens en général.

ALEXÏS ▬ Désirez-vous compléter ce succulent repas avec un dessert ?

Rester neutre fut difficile mais il crut bien s’en sortir. Pour explication, qui de nos jours parle comme un vendeur qui vante les mérites de son restaurant alors qu’il vient simplement de rencontrer la personne et lui propose un désert? Peut-être était-ce le mot succulent ou l’utilisation du verbe compléter, ou encore ce vouvoiement excessif. Bref quelque chose le titilla dans cette phrase et ne pas avoir été Zakhar il se serait surement payer sa tête. Cependant fidèle à lui-même il sut garder son visage neutre, en pensant cependant bien haut et fort dans son crane tout ce qui s’était dit auparavant. Gay vous dites? Un cas fini à trainer de toute urgence à la parade gay de Manhattan.

ZAKHAR ▬ Votrrre New-Yorrkais avec coulis de frrraise, ce serrra tout.

Il s’était tenu loin de la dame alors qu’elle notait et débarrassait la table. Un cheesecake avec fraises ne serait pas de refus et changerait énormément ses habitudes alimentaires de ces jours-ci, qui se ressemblaient du plus en plus et qui lui donnait parfois de légers maux d’estomac. Aux États-Unis tout était gras et ce n’était pas peu dire. Même les plats qu’il avait l’habitude de manger en Russie ne goûtaient plus pareil, y compris la viande et le lait. Allez savoir avec quoi ils engraissent leurs animaux, le résultat reste le même, ça ne goûte pas toujours très bon. Au moins là il se faisait payer un repas qui avait le mérite d’être à son gout, du moins pour l’instant.

Il ne sut jamais pourquoi, un autre des grands mystère de la vie, Alexis lui demanda si le repas fut délicieux et ce de son côté. Zakhar ne sembla pas trop comprendre durant quelques secondes. Était-ce là une expression anglaise qu’il ne saisissait pas où s’il y avait des côtés où on devait manger un repas? C’est quoi ces façons de s’exprimer à la fin? Il avait le droit de lui balancer la table par la tête et de simplement s’en aller en prenant son dessert pour emporter? Surement pas et c'est bien là une des choses les plus frustrante de cette société. Fut-il, là encore c'est un temps de verbe qu'il lui prit longtemps avant de bien être sur de le saisir et de comprendre qu'il s'agissait bien du verbe être mis à un temps que personne n'utilise jamais.

Why don't you ask the kids at Tiananmen Square

Ça aurait été une bonne réponse, mais c’est pas certain qu’il aurait compris. Il avait beau ne pas savoir vivre en société, il savait aussi que dire cela ne lui aurait pas donné meilleure allure que ce débile qui raconte n’importe quoi avec des phrases tout droit sorties du château impérial des années xx il y a fort fort longtemps et tout cela pour se donner des grands airs auprès des gars qu’il attire en leur renversant du café dessus. De nos jours on fait mieux question drague.

ZAKHAR ▬ De... Mon... côté?

Il pesa chacun des mots, tant parce qu’ils ne faisaient pas de sens que car il ne les comprenait pas dans ce contexte. Cependant le cadet des Nikonov n’était pas stupide pour autant et avait compris le sens de la phrase, le pourquoi il posait une question aussi étrangement formulée. Ayant fini depuis un petit moment son repas et pratiquement fait de même avec son breuvage, il était certain qu'il pouvait désormais dire son appréciation du repas et de l'endroit sans doute.

ZAKHAR ▬ Oui, c'était trrrès bon.

Voilà, une réponse claire, nette et précise et que tout le monde peut comprendre, même le dernier des tarés.
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